Une méthode pour récupérer rapidement après la chirurgie



Mise au point par un médecin danois à la fin des années 90, la récupération rapide après chirurgie est répandue dans les pays scandinaves.


Dans cette méthode danoise de récupération rapide après chirurgie, l'anesthésie est plus légère. © ARIS MESSINIS / AFP

Deux heures à peine après son opération de prothèse totale de hanche, M. B. est debout, sans canne ni béquille. Il a bénéficié de la méthode danoise de récupération rapide après chirurgie (RRAC), encore balbutiante en France, mais"prometteuse" et probable source d'économies. Vêtu d'un short et d'un t-shirt, ses tennis au pied du lit, ce quinquagénaire semble prêt à faire du sport. Mais si le corps fonctionne, l'esprit est encore "un peu ensuqué" par l'anesthésie, avertit le Dr Moulay Méziane qui vient de l'opérer à la clinique Claude-Bernard d'Ermont, en région parisienne.
Il y a encore quelques années, après une prothèse de hanche, le patient se levait au bout de dix jours, maintenant c'est deux heures"
"Ça va ?" lui demande le chirurgien. Après un blanc de quelques secondes, M. B. répond d'une voix assurée : "Oui, très bien. J'attends la visite du kiné pour rentrer chez moi". Satisfait, le médecin lui donne quelques petites tapes amicales dans le dos qui le font légèrement tanguer. "Prenez bien appui sur vos deux jambes", insiste-t-il. Deux infirmiers, restés près du patient, sourient. "Il y a encore quelques années, après une prothèse de hanche, le patient se levait au bout de dix jours, maintenant c'est deux heures", souligne l'un d'eux. C'est tout l'enjeu de la récupération rapide : en position verticale, le patient devient "acteur de sa guérison", souligne le Dr Karem Slim, président de l'association GRACE (Groupe francophone de réhabilitation améliorée) et chirurgien au CHU de Clermont-Ferrand, qui applique la méthode depuis 2007. La récupération rapide après chirurgie, mise au point par un médecin danois, le Dr Henrik Kehlet, à la fin des années 90 et répandue dans les pays scandinaves, consiste à diminuer le stress que représente toute intervention chirurgicale. Moins "agressé", donc"moins "immuno-déprimé", le patient se sent mieux, se remet plus vite, et fait moins de complications", assure le Dr Slim à l'AFP. Fini le jeûne de 24 heures avant de "passer sur le billard". Dans le protocole de la récupération rapide, il peut manger six heures avant et boire deux heures avant. L'anesthésie est plus légère. Perfusions et sondes sont évitées au maximum. Le patient remange rapidement.

Un état des lieux attendu en 2016 

La RRAC s'applique à des hospitalisations longues comme à la chirurgie ambulatoire, et concerne des interventions lourdes : prothèse de hanche ou du genou, ablation partielle de la vessie ou du colon, etc. À la clinique Claude-Bernard, qui applique la RRAC depuis deux ans, la durée d'hospitalisation moyenne est passée de 7 jours fin 2013 à 4,5 jours fin 2014 pour une prothèse de hanche. Aux Hospices civils de Lyon (HCL), où certains services recourent à la méthode depuis 2012, "la durée moyenne de séjour a baissé de deux jours en deux ans" dans ces unités, évalue Véronique Faujour, du département stratégie, auprès de l'AFP. "Une fois que l'on a vu les résultats, on ne peut pas revenir en arrière", assure la gestionnaire. D'autant que la réduction des durées de séjour et la diminution des complications entraînent des économies pour le système de santé. Aux HCL, 200.000 euros d'économies par an ont été réalisées grâce à la RRAC, estime Mme Faujour. 
EFFICACITÉ. Dans un récent rapport, l'assurance maladie juge que la méthode danoise "est une dynamique à encourager", car elle permet "la diminution de la durée de séjour, l'amélioration de la convalescence et de la qualité de vie du patient". La Haute autorité de santé réalise actuellement un état des lieux de la réhabilitation rapide, en France et à l'étranger, attendu au printemps 2016. Dans sa note préparatoire, elle qualifie de "prometteurs" les résultats de cette méthode, tout en soulignant"l'hétérogénéité des pratiques, d'où la nécessité d'évaluation". Ses conclusions sont attendues avec impatience par les partisans de la RRAC. Selon le Dr Slim, "il faut que la législation et la nomenclature évoluent, pour encourager les bonnes pratiques".
source : sciencesetavenir