Des souris sourdes retrouvent l'ouïe !



Grâce à une thérapie génique, des chercheurs américains et suisses ont restauré l'ouïe de souris affectées d'une forme de surdité génétique.


Une souris atteinte de surdité a retrouvé l’ouïe grâce à une thérapie génique ! © SOLENT NEWS/SIPA

THÉRAPIE GÉNIQUE. Une souris atteinte de surdité a retrouvé l’ouïe grâce à une thérapie génique ! Voici l’annonce pleine d’espoir qu’ont faite des chercheurs du Boston Children’s Hospital and Harvard Medical School, associés à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) lors d’une publication dans Science Translational Medicine. De un à quatre enfants sur mille naissent sourds à la naissance. La grande majorité de ces surdités précoces est d’origine génétique. Actuellement 70 gènes sont identifiés comme pouvant provoquer la surdité, s’ils sont mutés. Parmi eux, le gène TMC1 qui encode une protéine cruciale dans l'audition. La protéine TMC1 est impliquée dans le fonctionnement d’un canal ionique des cellules ciliées de l'oreille interne. Un canal qui transforme les vibrations sonores en message nerveux dans le cerveau.
Un enfant porteur de deux copies mutantes de TMC1 (mutation récessive) à la naissance, souffrira de pertes d'audition profondes dès son plus jeune âge. Le porteur d’une seule copie de la mutation (mutation dominante) verra, lui, une surdité progressive s’installer à partir de 10 à 15 ans.

Deux formes de surdité génétique

Les chercheurs ont utilisé deux types de souris génétiquement modifiées pour reproduire la surdité observée dans ces deux cas. Une souris manipulée pour ne pas exprimer du tout de protéine TMC1 imite les mutations récessives. Une autre souris où l’on a introduit une mutation ponctuelle dans la protéine TMC1 est un bon modèle pour la forme de surdité dominante. Ces deux types de souris ont alors subi un traitement. L'équipe de Harvard leur a injecté au niveau de l’oreille interne un virus génétiquement modifié (vecteur) dans lequel les chercheurs du Brain and Mind Institute de l’EPFL avaient introduit le gène TMC sain. Avec l’espoir de corriger les effets de la mutation.
"Un grand nombre de vecteurs porteur du gène sain (plus d'un milliard) a été introduit au travers de la ‘fenêtre ronde’ dans l’oreille interne, explique Bernard Schneider de l’EPFL. Le vecteur diffuse alors dans la cochlée jusqu’aux cellules ciliées à traiter, et le gène TMC sain s’intègre dans le noyau de la cellule." Pour des cellules ayant un faible taux de renouvellement comme ces cellules ciliées, une seule injection suffit. "Le traitement est pensé pour être unique."

Les cellules ciliées produisent à nouveau un courant électrique

Quelques temps plus tard, surprise : chez le modèle de souris "surdité récessive", la capacité des cellules ciliées sensorielles à répondre aux sons – en produisant un courant électrique mesurable – a été restaurée et les souris sourdes ont retrouvé une capacité à entendre ! Dans le modèle "surdité dominante", la thérapie génique s'est avérée positive au niveau cellulaire et cérébral, mais moins convaincante dans le test de l’ouïe.
"Notre protocole de thérapie génique n'est pas encore prêt pour des essais cliniques – nous devons encore faire des ajustements – mais nous pensons que dans un avenir pas trop lointain, il pourrait être développé pour un usage thérapeutique chez les humains", explique Jeffrey Holt, chercheur au Boston Children's Hospital. L’expérience n’a, en effet, pas atteint son efficacité optimale. En cause, le vecteur. "Il n’atteint que la première des quatre rangées de cellules ciliées, affirme Bernard Schneider. Or les trois couches suivantes sont là pour amplifier le signal. Il faut les atteindre pour avoir un meilleur résultat." L’équipe travaille déjà à l’élaboration d’un nouveau vecteur qui ciblerait davantage de cellules ciliées. "C’est une preuve de concept, on doit aller au-delà."
source : sciencesetavenir